Le principe de base d'une coopérative est que le processus de décision est également partagé entre les coopérateurs (on dit aussi "associés" ou "sociétaires"), indépendamment de la part de capital détenue par chacun. Par rapport à une société non coopérative le principe "une action, une voix" est donc remplacé par "une personne, une voix" (NB : tous les salariés d'une SCOP ne sont pas nécessairement coopérateurs , pour le devenir un salarié doit présenter sa candidature à l’assemblée générale de l’entreprise ; s’il est accepté, il devra acquérir au moins une part sociale).
Ce principe ne prend évidemment pleinement son sens que si les coopérateurs détiennent une majorité du capital (NB : une partie du capital peut être détenue par des associés extérieurs, des particuliers ou des personnes morales).
Un autre point de définition de la coop est la redistribution des bénéfices (dividendes) en fonction de l'activité réalisée avec la coopérative plutôt qu'en fonction des capitaux investis (ce qui revient à privilégier le travail sur le capital).
Il résulte de ces trois principes de base que, en comparaison avec une entreprise non coopérative, la coopérative est (supposément) caractérisée par :
Ces deux points confèrent à la coopérative un caractère "sociétal", entendu comme alternative à la maximisation du profit à court terme qui caractérise plus souvent les entreprises non coopératives. C'est en raison de cet engagement sociétal (l'idéal coopératif) que la coopérative bénéficie généralement d'un traitement socio-fiscal plus avantageux [France, Belgique].
On pourrait comparer ainsi deux paradigmes :
La coopérative peut donc être vue aussi comme un moyen de combiner économies d'échelles et approche artisanale.
Notons enfin que les coopératives sont actives dans des secteurs très divers : agriculture, distribution pharmaceutique, banque (PS : une banque coopérative est parfois appelée "mutuelle"), ...
La définition légale d'une coopérative varie selon les pays, et est relativement souple. Cette souplesse peut prendre la forme d'un cadre légal simplifié entourant les statuts librement convenus par les coopérateurs, ou en spécifiant de façon plus détaillée une série de types de coopératives.
Voici quelques points fréquemment traités dans les statuts de coopératives :
Il existe ainsi une grande variété de coopératives, qui sont généralement conçues en privilégiant le point de vue d'un acteur ou une fonction de l'entreprise :
Par exemple dans le cas d'une centrale d'achat la participation à une telle coopérative est généralement motivée par la seule volonté d'obtenir de meilleurs prix.
Une motivation plus universelle, et encore un peu plus éloignée de l'idéal coopératif, est la volonté d'échapper aux règles du droit des sociétés et/ou de bénéficier des avantages fiscaux de la coopérative [source].
Encore un plus loin de l'inaccessible étoile, il y a des coopératives dont les coopérateurs sont non pas des individus mais des personnes morales sous statut d'entreprise ... non coopérative.
Un facteur de différenciation commun à tous les types de coopérative est donc leur "distance" par rapport à l'idéal coopératif : certaines coopératives sont plus coopératives que d'autres, de sorte que (pour détourner la célèbre citation du roman Animal Farm de George Orwell) « certains coopérateurs sont plus égaux que d'autres ».
Catégories de part. Certains statuts ou réglementation prévoient plusieurs catégories de parts sociales qui engendrent des droits et des obligations différents pour les associés qui les possèdent. Chaque part donne droit à une série de voix, octroyées en fonction de la valeur nominale de la part (par exemple : une part avec valeur nominale de 100 euros donne droit à une seule voix ; une part d’une autre catégorie avec valeur nominale de 200 euros donne droit à deux voix, etc.) ... [source].
La crise financière de 2008 (dite "des subprimes") a montré que des entreprises "coopératives" connaissent les mêmes travers que les non coopératives : logique névrotique du "toujours plus", maximisation du profit immédiat, investissements trop risqués, pratiques frauduleuses, salaires exorbitants auto-attribués par les dirigeants, etc [source].
Les coopératives peuvent donc être victimes des mêmes travers que les démocraties "représentatives" dès lors que le comité de direction (le gouvernement) n'est pas sous contrôle réel des coopérateurs (les citoyens). Enfin il semble que le risque de perte de contrôle par les coopérateurs augmente avec la taille de l'entreprise.
Reprise en SCOP : le risque de hold up des dirigeants(3m31s - 2017)
Quelles sont les raisons de cet écart entre l'idéal coopératif et la réalité de terrain ? La réponse à cette question commence par la constatation que les principes de base mentionnés dans la première section ne sont pas suffisant pour prévenir les dérives. Les différences de capital financier personnel et de capacité de travail (physique et surtout intellectuel) entre coopérateurs sont également déterminantes dans la répartition du pouvoir. Pouvoir de décision et pouvoir de réalisation sont deux choses distinctes.
On comprend dès lors que les règles que s'imposent les coopérateurs ont leurs limites (ainsi pour échapper à la faillite, certaines coopératives renoncent à leur statut de coopérative), et que l'idéal coopératif fait d'autant plus sens qu'il s'inscrit dans le long terme (notamment au travers de l'apprentissage par la pratique) et que, ce faisant, il relève d'une philosophie de vie personnelle et collective (notamment au travers de la notion de partage).
Les contextes culturel (long terme) et conjoncturel (court terme) jouent donc un rôle déterminant.
La théorie économique distingue deux facteurs de production : le travail (physique et intellectuel) et le capital (matériel et financier). Dans notre article "Travail et valeur" nous avons montré que seul le travail est facteur (c-à-d agent) de production, tandis que le capital n'est que moyen (c-à-d objet) de production [approfondir].
La problématique du travail induit celle de son organisation tandis que la problématique du capital induit celle de son contrôle. Ces deux problématique sont intriquées. En toile de fond il y a le caractère démocratique – ou non – de l'organisation. À cette face politique s'adosse la face économico-sociale de la responsabilité sociétale des organisations.
Nous commencerons ici par la question du capital (matériel et financier), ensuite nous développerons celles du travail (physique et intellectuel). Constatons déjà que dans l'entreprise privée traditionnelle ceux qui exercent le travail intellectuel détiennent la plupart du capital financier, tandis que les travailleurs manuels utilisent un capital matériel qui n'appartient pas à eux mais aux capitalistes financiers. Il ne s'agit donc pas d'une situation d'équilibre de type "chacun sa spécialité", mais au contraire d'un déséquilibre au niveau du contrôle des moyens de production, puisque le capital financier c'est l'ensemble des titres de propriété sur le capital matériel.
4.1. Capital (matériel et financier)Les faits évoqués dans la section précédente suggèrent que le capital devrait être majoritairement détenu par les coopérateurs en part égales.
Mais cela implique que le montant d'une part est déterminé par le moins riche des coopérateurs. Une telle coopérative a donc par nature plus de difficulté à trouver du financement qu'une entreprise non coopérative, ce qui peut constituer un handicap concurrentiel, voire rendre impossible sa création.
Et si plutôt que de parts égales il s'agit de parts non récupérables un coopérateur plus fortuné pourra malgré tout exercer un pouvoir de coercition sur ses associés en investissant dans la coopérative par petits paquets et en faisant comprendre ou croire qu'il ne continuera à financer la coopérative qu'à ses conditions.
Allocation universelle. On notera que dans une économie dont le système de sécurité sociale aurait été réformé sur base du modèle synthétique de l'allocation universelle, les besoins de financement peuvent être réduits du montant des salaires puisque grâce cette AU les coopérateurs sont en mesure de ne plus se payer de salaire.
Droit de propriété
Le droit distingue trois principes constituants de la propriété d'un bien :
Exemples :
Les droits de propriétés peuvent être détenus par des personnes physiques (individus) ou morales (organisations privées ou publiques).
Enfin les économistes libéraux considèrent le droit de propriété de moyens de productions (biens mobiliers et immobiliers) comme favorisant le développement économique car la propriété de biens serait un incitant à les gérer efficacement. Ils identifient à cet égard une série de droits liés à la propriété d'un bien : droit de le posséder, d'en exclure l'usage à autrui, de le vendre, d'en faire (ou pas) un usage productif, de le gager, de leur louer, de le protéger, d'en obtenir dédommagement en cas de dommage.
Les différentiels de capacité de travail physique et (surtout) intellectuel entre coopérateurs peuvent avoir sur le partage effectif du pouvoir de décision et de réalisation des effets très semblables aux différentiels de capital financier.
Les capacités intellectuelles ainsi que la taille et qualité des réseaux relationnels sont parfois appelés "capital humain". Cependant la capacité manuelle (la dextérité) fait appel aussi bien aux capacités physiques qu'intellectuelles. S'agissant de processus vivants (et humains en l'occurrence) nous les considérerons comme du travail, et non comme du capital.
Cependant le "capital humain" ne peut-être intégralement partagé de façon égalitaire : certains apprennent mieux que d'autres, et disposer de spécialistes est utile. Mais d'autre part un niveau suffisant de culture générale chez l'ensemble des coopérateurs est également nécessaire pour la motivation, la cohésion et la cogestion.
Il importe donc de tendre vers une répartition optimale du "capital humain" entre les coopérateurs. La formation permanente joue ici un rôle déterminant. C'est la question de la répartition des tâches au sein de l'entreprise, donc de la structure organisationnelle et donc du management. Qui décide quoi ? Or la problématique de l'organisation du travail est étroitement intriquée avec celle du contrôle du capital, et cela dans une société dont l'évolution est marquée par :
Cette dynamique ne peut être étudiée avec les seuls outils théoriques des sciences "exactes" (physique, mathématiques, ...) mais doit incorporer la notion de classe dirigeante et de lutte des classes. Les stratégies appliquées (ou non ...) par les parties jouent ici un rôle perturbateur. Des exemples de telles stratégies sont les nouveaux concepts tels que "entreprise libérée", "holacratie", "agilité", "transversalité", etc, développés dans les écoles de management et par de grandes sociétés de consulting, et que nous sommes invités à considérer comme des évolutions démocratiques alors que, loin d'une évolution émancipatrice, il s'agit en réalité de techniques visant in fine à accroître la soumission des membres d'une organisation à un leader charismatique (cf. vidéo suivante). La problématique essentielle, à savoir la propriété privée ou collective de l'entreprise, est quant à elle passée sous silence, et notamment le fait que le fructus et l'abusus demeurent au main des propriétaires privés.
Des méthodes managériales pour renforcer la subordination des salariés(8m14s - 2018)
C'est afin d'élargir la réflexion sur la question fondamentale des droits de propriété sur les moyens de production que nous avons développé la notion de coopérative publique.
Il existe actuellement dans divers pays des statuts que l'on pourrait qualifier "d'étapes vers la coopérative publique".
France :
Au début des années 2000 a été créé le statut de "société coopérative d'intérêt collectif" (SCIC). Contrairement à la SCOP qui fut historiquement une initiative de travailleurs (cf. les Équitables pionniers), la SCIC est une initiative politique. L'objectif est de favoriser l'interaction et des synergies entre l'ensemble des parties prenantes du développement d'une localité : salariés, clients, usagers, riverains, fournisseurs, collectivités territoriales, entreprises, associations, bénévoles, etc. Ainsi des parties prenantes externes à l'entreprise bénéficient généralement d'un droit de vote, et peuvent même détenir des parts (notamment les pouvoirs publics).
À leur création en 2001, le secrétaire d'État à l'économie solidaire prévoyait la création de 2.000 SCIC dans les deux ans [source p. 6]. Mais fin 2015 il n'y en avait que 500 [source]. Le nombre de SCIC augmente constamment mais beaucoup plus lentement que prévu.
Une étude publiée en 2009 montre que les activités des "entreprises sociales" peuvent être réparties en quatre groupes : l'insertion professionnelle, le développement durable, la gestion des biens communs et les synergies d'activités. D'autre part il subsiste une certaine disparité dans les distances à l'idéal coopératif et sociétal [source].
En Belgique Smals fournit des services IT aux administrations de l'État belge. Smals est une association sans but lucratif (ASBL), statut qui contrairement à d’autres formes juridiques (SA, SPRL, etc) ne requiert pas de fournir un capital de départ [source]. Bien que ses membres sont tous des organisations publique Smals est soumise au droit privé [source] (son personnel a un contrat de travail avec Smals - source), et n'est donc pas une ASBL publique. En tant qu'association de frais Smals fournit à ses membres uniquement des services qu'elle facture au prix de revient [source].
Il existe très peu de références au concept de "coopérative publique" [vérifier], pour lequel il ne semble pas encore exister de statut légal spécifique. C'est regrettable car les faits évoqués dans le présent article suggèrent que ce type d'entreprise pourrait constituer le fondement économique d'un régime politique de DD.
Nous appelons "coopérative publique" toute entreprise vérifiant les principes suivants :
Propriété : la coopérative est intégralement propriété de l'État (ou d'une municipalité), qui se limite à déterminer les grands objectifs visant à garantir l'adéquation des activités de la coopérative avec sa politique économique (nationale ou locale).
L'État ou la municipalité joue donc le rôle de membre du conseil d'administration. Et si le régime politique est la démocratie directe, la cessation d'activité peut être décidée par un référendum automatique.
Gestion : la gestion quotidienne de l'entreprise est assumée collectivement par les salariés selon les principes suivants de la DD :
La leçon des militaires sur l’exécution de la stratégie(2m29s - 2017)
Taille maximale ? La taille maximale d'une coopérative publique (en nombre de coopérateurs) pourrait être fixée à un niveau tel que chaque coopérateur peut connaître tous les autres. Le psychologue social Robin Dunbar nous donne un élément de réponse : le nombre d'individus avec lesquels une personne peut entretenir simultanément une relation humaine stable serait limité à environ 150, en raison de la taille de notre cerveau impliqué dans les fonctions cognitives dites supérieures, le néocortex. [source].
Le passage au statut de coopérative – privée comme publique – constitue un bouleversement organisationnel et humain. Les coopérateurs doivent être en mesure de relever divers défis :
vaincre la résistance des managers au changement de culture, et neutraliser le risque qu'ils reprennent le pouvoir par des voies détournées ;
maîtriser les compétences de base pour chacun des départements de la coopérative (production, finance, marketing, ressources humaines, juridique, ...) et les outils pour une participation efficace à la gestion collective (logiciels de travail collaboratif) ;
Ce troisième point est évidemment largement déterminé par le précédent ...
Les étapes clés d’un basculement en Scop (3m39s - 2017)
Pour relever ces défis avec succès il convient selon nous de remplacer chaque directeur de département par un coopérateur "délégué", tiré au sort dans un pool de coopérateurs candidats disposant des compétences de base (ils doivent avoir suivi une formation conçue spécifiquement pour les délégués de département de coopérative), avec rotation annuelle (le but étant que la formation de base soit complétée par la pratique partagée par rotations).
Ne dites plus "directeur". Le terme de "directeur" est désormais remplacé par celui de "délégué", mais la fonction qu'il assume est bien une fonction de direction. Il est à la fois délégué (dimension politique) et directeur (dimension opérationnelle), mais il est primordial d'exprimer la primauté du politique (le but) sur l'opérationnel (le moyen).
En outre chaque délégué est secondé par un "conseiller permanent" (CP), qui peut être soit l'ancien directeur du département soit un spécialiste provenant de l'extérieur. On peut le voir comme le chef de cabinet d'un ministre.
Sur le long terme, chaque coopérateur qui accède à un poste de délégué compense son déficit de savoir par rapport au CP du département par ses connaissances globale de l'entreprise. Le corollaire est évidemment que les CP ne peuvent jamais assumer de fonction de délégué.
On distingue donc dans ce système deux types fonctionnels de coopérateurs :
Enfin il n'y a pas de délégué général. Cette fonction est exercée par l'AG (de préférence) ou par le comité des délégués de département. Dans les deux cas les décisions sont prises par votation majoritaire.
Notons que l'AG peut fonctionner de façon "virtuelle", c-à-d en réseau, de façon permanente et en temps réels (cf. référendum automatique). Dans ce cas les votations se font par vote électronique.
SCOP d'amorçage. En France, depuis 2015, le nouveau statut de la "SCOP d’amorçage" permet aux salariés de reprendre une entreprise et de détenir la majorité des voix à la constitution de la société tout en étant minoritaires au capital. Il leur accorde sept ans pour détenir une majorité du capital. Les associés non coopérateurs doivent s’engager à céder ou à obtenir le remboursement d’un nombre de titres permettant aux associés coopérateurs d’atteindre le seuil de détention de 50 % du capital au terme des sept ans. Cet engagement figure dans les statuts de la société coopérative nouvellement créée et conditionne l’obtention du statut fiscal dérogatoire de la SCOP dont les statuts doivent être communiqués à l’administration fiscale. Cette période de sept ans permet par ailleurs d’utiliser les réserves de la SCOP pour acquérir ou rembourser les parts sociales proposées à la vente par un associé non salarié [source]. En 2017, soit deux ans après la création de ce nouveau statut, une seule entreprise en a usé ... [source]. L'explication n'est-elle pas à trouver dans les faits identifiés par la présente analyse ... ?
Voir aussi
Dans konfedera.org nous développons un concept de système écopolitique fondé sur le partage du pouvoir politique (par la démocratie directe) et du pouvoir monétaire (par l'allocation universelle). À noter que ce partage relève moins de considérations morales que pratiques : ces deux pouvoirs sont intimement liés, de sorte que le partage de l'un est difficilement concevable sans le partage de l'autre.
Dans ces conditions les entreprises publiques peuvent très bien être soumises à la concurrence. Et les entreprises publiques qui seraient déficitaires pendant x années pour des montants dépassant une valeur y seraient proposées à fermeture par contrat intelligent : lorsque une entreprise publique atteint les valeurs de x et y (qui ont été déterminées par référendum) un référendum est automatiquement organisé par le contrat intelligent, qui demande à la population si elle accepte la fermeture de l'entreprise [cf. /referendum-automatique].
N.B. L'AU n'est pas le salaire des coopérateurs publics : comme n'importe quel revenu du travail, celui-ci s'ajoute à l'AU.
Enfin dans notre article "/entreprise-publique" nous avons montré que l'État devrait créer plusieurs entreprises publiques concurrentes dans chaque secteur stratégique, et gérer celles-ci sous statut de coopératives publiques.
Notion de "propriété d'usage" dans le modèle collectiviste de l'AU
Concernant la problématique de propriété, Bernard Friot, professeur émérite de l'université de Nanterre propose – non pas de remplacer la propriété privée par la propriété publique – mais de supprimer la "propriété lucrative" tout en généralisant la "propriété d'usage". Chaque citoyen devrait être propriétaire (ou co-propriétaire) de son outil de production et de son logement. L'important est qu'on ne puisse s'enrichir par la propriété (de moyens de production, terrains, immeubles, monnaie, brevets, ...) mais par son seul travail.
Le principe de propriété d'usage signifie : « que nous ne tirons aucun revenu de cette propriété, et qu’elle n’est transmissible que comme propriété d’usage. Pas de parts sociales cessibles (qui donnent droit, aux sociétaires, à des dividendes) comme dans trop de coopératives : dès qu’on est embauché, on entre dans l’entreprise avec tous les droits d’un copropriétaire (décision sur l’investissement, le produit, la hiérarchie, le collectif de travail…), sans nécessité d’un quelconque apport autre que celui de son travail, et quand on la quitte, c’est sans autre enrichissement que celui d’une progression salariale, si on a pu passer une épreuve de qualification grâce à l’expérience acquise » [source].
Le fait que la suppression de la propriété lucrative et la généralisation de la propriété d'usage n'auront de sens que si cette dernière n'est génératrice d'aucun autre revenu que celui du travail (le salaire), est pleinement cohérent avec le fait que ce n'est pas l'entreprise qui paiera les salariés copropriétaires mais la caisse nationale de cotisation salariale. Friot précise que cette centralisation du paiement des salaires est fondamentale car elle s'oppose à « l'allocation microéconomique de la valeur ajoutée par les entreprises », fondement des « institutions du capital » La propriété d'usage atteste en effet de l'autorité partagée à décider de ce que l'entreprise va produire, comment, à quels prix, etc. [source p71.].
Friot ne dit cependant rien quant à la façon dont la société pourrait passer de la "propriété lucrative" à la "propriété d'usage" ...
Pour approfondir :
Il est instructif de comparer ces notions relatives au modèle d'AU collectiviste à l'AU libertaire, dont certains auteurs tels que Jacques Berthillier ont proposé que la réforme fiscale qui accompagnera l'instauration de leur AU introduise le principe de non‐transmission héréditaire du capital productif. L'État en deviendrait propriétaire et le mettrait en location [source]. Lorsque ce capital productif est une entreprise ses salariés pourraient alors en devenir locataires.
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Une publication de François Jortay