V. Critique

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Màj : 18 fév. 2023   –   # pages : 7

Préambule

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Je n'ai pas la certitude que la DD, telle que définie ici, est faisable ni même souhaitable. Je pense cependant que mener une réflexion détaillée sur la façon de la réaliser, et sur ce que sa réalisation impliquerait, est une façon très efficace de participer à l'amélioration des systèmes politiques.

Le présent document présente une série de critiques souvent formulées à l'encontre de la DD. J'y réponds systématiquement de façon constructive.

Majorité

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« La démocratie est la dictature de la majorité ».

Si nous disons que la démocratie est le moins mauvais des systèmes, c'est parce que nous préférons la dictature d'une majorité à celle d'une minorité. Un État véritablement démocratique ne représente pas seulement une majorité mais aussi ce qu'il y a de commun à l'ensemble des citoyens : désir de justice, de sécurité, de coordination, etc. Ainsi par exemple qui est à même de garantir au mieux le droit des minorités et des individus si ce n'est la majorité composite de l'ensemble des individus et minorités ? Il ne faut pas perdre de vue que la composition de la majorité change à chaque sujet de votation, de sorte que ce n'est généralement pas la même minorité qui est mécontente du résultat d'une votation "perdue".

Réponse
à Camus

Si je vous dis "La natation ce n'est pas nager dans l'eau mais se déshabiller", la plupart d'entre-vous trouveront cette affirmation absurde (du moins je l'espère pour eux). Mais si je vous dis « La démocratie ce n’est pas la loi de la majorité mais la protection de la minorité » [Albert Camus, Carnets III, p. 260], alors un nombre non négligeable d'entre vous ne trouveront pas cela absurde, alors que cette citation est pourtant construite selon la même "logique" biaisée que la première.

Ce jugement contradictoire et aberrant est typiquement le résultat d'une propagande oligarchique (tiens donc, une minorité ...). À force d'entendre répéter des absurdités par des "leaders d'opinion" (sic), certains d'entre nous, manquant de sens critique, en arrivent à les intérioriser comme faisant partie de la "normalité".

La majorité peut certes se tromper et même opprimer, mais ce peut être aussi le cas d'une puissante minorité oligarchique, que ce soit à l'encontre d'une majorité ou, qui plus est, d'une minorité ! Il n'est donc aucunement justifié de renoncer à la loi de majorité et à la démocratie directe, dont l'avantage essentiel sur tous les autres systèmes politiques est d'éduquer et responsabiliser la population par la pratique de la participation directe au pouvoir politique. Voulons-nous stagner ou progresser ?

Compétence

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« La technocratie est plus efficace que la démocratie ».

Cette affirmation est infirmée par de récents travaux de R&D concernant l'intelligence collective et l'effet d'émergence induit par la diversité des points de vue. Approfondir : intelligence-collective#emergence.

D'autre part on réfléchira utilement à cette proposition de Paul Feyerabend : « La séparation de l’État et de l’Église doit être complété par la séparation de l’État et de la Science : la plus récente, la plus agressive et la plus dogmatique des institutions religieuses. Une telle séparation est sans doute notre seule chance d’atteindre l’humanité dont nous sommes capables, mais sans l’avoir jamais pleinement réalisée » [source].

Taille

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« La DD devient impossible dès que la population dépasse une taille au-delà de laquelle il n'est plus possible pour chacun de connaître tous les autres membres de la communauté. Les technologies de vote et d'identification en réseau n'offrent pas de solutions crédibles à cette limitation en raison d'un risque élevé de grave piratage du système ».

Concernant la démocratie directe sans recours aux technologies informatiques il faut noter qu'on a pas encore exploité toutes les possibilités non-technologiques. Par exemple chaque quartier/village pourrait disposer d'un bureau de vote permanent, ce qui permettrait de procéder en permanence à des référendums. Concernant le recours aux technologies s'il faut certes faire preuve de prudence il ne faut pas non plus se laisser emporter par un pessimisme anti-technologique dogmatique et aveugle, qui pourrait nous priver de nouvelles opportunités [approfondir]. C'est pourquoi le projet démocratiedirecte programme une double implémentation du système de gouvernance défini dans l'article "Définition" : l'une sans vote "électronique" (implémentation "blanche"), et l'autre utilisant toutes technologies disponibles (implémentation "noire").

Fraude

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« Le vote par Internet sur lequel repose la démocratie directe facilite la fraude à grande échelle ».

C'est là une thèse propagée par la presse ainsi que par une partie de la communauté scientifique favorable à la technocratie. Mais si le vote traditionnel faisait l'objet d'analyses de risque aussi complètes que le vote par Internet (notamment en intégrant la concentration et publication des résultats) il est évident que le vote traditionnel perdrait de sa réputation surfaite en matière de sécurité. Le vote par Internet apporte certes ses propres inconvénients, mais le progrès technologique fait que le bilan bénéfices/risques lui est favorable.

Ainsi la cryptographie quantique bouleverse totalement l'actuel paradigme de sécurité, par l'abandon du mythe de système inviolable, et son remplacement par le principe d'identification systématique et immédiate de toute lecture et modification des données et du code d'un système informatique. Quant aux chaînes de blocs, elles permettent de décentraliser et ouvrir les processus (dont le contrôle). Enfin l'intelligence artificielle, en particulier les techniques de méthode formelle, permettent de maximiser la qualité des logiciels (nettoyage des bugs) a des niveaux jamais atteints.

Limitations logiques

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Échelle
individuelle

Le théorème de l'électeur médian stipule qu'il existe des cas où, pour un individu, la probabilité de changer le résultat d'un vote à l'aide de son seul vote ("votant pivot") est quasiment nulle, le choix médian étant généralement plébicité. Par conséquent, dans les cas en question, et si les agents sont rationnels et égoïstes, le coût d'aller voter (déplacement, et éventuellement collecte préalable d'informations) est généralement supérieur à l'espérance de gain ou à l'utilité que le votant lui attribue.

Cependant il s'agit là d'une analyse individualiste du vote. Or celui-ci participe bien plus d'une approche collective. L'humain peut parfois placer l'intérêt collectif avant son intérêt individuel. Il peut s'agir notamment de participer à la légitimation démocratique d'une décision, quelle qu'elle soit, en maximisant le taux de participation. D'autre part la cyberdémocratie réduit le coût individuel du vote.

Échelle
globale

Élément majeur de la théorie du choix social, le théorème d'impossibilité d'Arrow (ou encore paradoxe de Condorcet) stipule que dans certains cas il n'est pas possible d'agréger des jugements portant sur trois options ou plus.

Il semble cependant qu'il suffirait de pondérer/valoriser le vote pour neutraliser cette impossibilité (exemple : méthode du jugement majoritaire).

Conditionnement

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« La DD est illusoire car la supposée "opinion publique" est très influencée par la répétition quotidienne des messages médiatiques dominants (*), qui expriment l'opinion de la classe dirigeante ».

(*) Cf. le phénomène d'info-addiction.

C'est sans doute le cas, mais il ne faut pas sous-estimer le nombre des individus que le conditionnement médiatique n’atteint pas. Ainsi dans l'expérience de Asch, qui mesure l'influence du groupe sur la capacité de jugement d'un individu, environ 60% des cobayes humains ne sont pas influencés. Mais 40% c'est plus que suffisant pour, par exemple, déterminer le résultat d'une élection. Ce pourcentage de 40% doit être mis en rapport avec la notion d'info-dépendance, qui suggère que pour renverser le rapport de force entre classes dirigeante et dominée, tout mouvement révolutionnaire doit prendre le contrôle des principaux moyens de production de l'information et du savoir.

Le résultat de l'expérience de Milgram, qui mesure l'influence des symboles d'autorité sur l'obéissance des individus, est encore plus interpellant : 60% des cobayes sont allés jusqu'à "tuer" sur injonction. Cependant la validité de l'expérience fait l'objet de critiques [source1, source2].

Participation

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« Seule une minorité de la population s'intéresse à la politique, de sorte que la démocratie comme expression de la majorité est une illusion ».

Dans quelle mesure n'est-ce pas justement parce que le système politique est accaparé par la classe politique et ses commanditaires fortunés que de nombreux citoyens s'en désintéressent ? D'autre part il ne faut pas se faire d'illusion : il n'y aura jamais de participation volontaire de tous au processus démocratique, même directe. Mais est-ce problématique dès lors que quiconque souhaitant y participer (experts, personnes directement concernées, ...) jouisse du droit de le faire ?

Du point de vie de la démocratie directe, il faut distinguer la question de la participation dans ses deux aspects :

  1. la partie de la population ayant participé à telle votation est-elle majoritaire ?
  2. la réponse ayant emporté le plus de suffrage à telle votation est-elle majoritaire :
    • parmi la population ?
    • parmi les participants ?

Technologie de l'information

https://democratiedirecte.net/critique#technologies-information

La DD est rendue possible par le progrès technologique, qui permet, l'organisation de votations en ligne, à grande échelle et à haute fréquence. Parmi les réalisations technologiques qui sous-tendent le projet de DD, il y a l'identité numérique (encore qualifiée de "digitale" ou "électronique"). Or force est de constater qu'une partie de la population fait une contre-productive confusion entre l'identité numérique, et ses éventuelles exploitations abusives par des gouvernements totalitaires, comme le traçage non sollicité de nos activités sociales, professionnelles et même privées. Or c'est évidemment le traçage non sollicité qu'il faut combattre, et non l'eID, qui permet notamment le vote par Internet et l'organisation de votations à grande échelle et à haute fréquence, c-à-d la démocratie directe. Qui renonce à utiliser couteaux et marteaux parce que ceux-ci peuvent servir à occire son prochain...? Se protéger des exploitations abusives des technologies en se détournant du progrès technologique est une "victoire" à la pyrrhus.

Cette attitude est d'autant plus absurde que la quasi totalité de ces conspirationnistes, n'ont pas remplacé leur smartphone par un gsm basique, ni leur système d'exploitation Windows ou macOS par la distribution libre Linux Debian, ...alors que les smartphones et systèmes non libres sont bourrés de logiciels de traçage.

Analphabétisme
numérique

La cause principale de la confusion (particulièrement prégnante dans le milieu "complotiste" ...) entre objet numérique et ses potentielles utilisations abusives est selon nous l'analphabétisme numérique (ou analphabétisme informatique), dans lequel sont maintenues les populations. C'est pourquoi dans notre article /citoyennete-numerique nous proposons un programme d'auto-formation grâce auquel chacun peut se sortir de l'analphabétisme numérique ... tout en décuplant sa productivité grâce à la maîtrise des technologies de l'information.

Une critique plus pertinente est le risque de manipulation de la plupart des systèmes de votation électronique actuels, en raison de leur trop grande centralisation (qui plus est par des entreprises privées, c-à-d en dehors de tout contrôle démocratique), et de la "boîte noire" que sont les logiciels de votation non "open source".

La solution que nous apportons à cette problématique consiste à généraliser l'utilisation du système d'exploitation Linux Debian (et sa suite de logiciels libres) :

  • dans l'administration publique (c-à-d l'offre de services politiques en termes économiques, ou encore le côté "serveur" en termes informatiques) ;
  • au sein de la population côté (c-à-d la demande de services politiques en termes économiques, ou encore le côté "clients" en termes informatiques) : /installer.

Rappelons enfin, last but not least, que notre méthodologie pour concevoir collectivement un système de DD, met en "concurrence" deux implémentations du système de DD : l'une sans vote électronique ni intelligence artificielle (implémentation "blanche"), et l'autre avec vote par Internet et IA (implémentation "noire"). PS : ces deux voies à priori opposées pourraient s'avérer in fine plutôt complémentaires...

Conclusion

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  1. Pour être pertinente la critique de la démocratie doit être celle de la démocratie directe puisque celle-ci est une application pleine des principes démocratiques, contrairement au système représentatif.

  2. Lorsqu'on étudie avec un sens critique les arguments avancés contre la démocratie directe relativement à la démocratie représentative [exemple] on s'aperçoit qu'en réalité, pour leur grande majorité, ces problématiques s'appliquent également à la démocratie représentative (compétences, travail d'information souvent conséquent, capacité du système à générer des concessions, compromis et consensus, ...).

  3. L'avantage essentiel de la démocratie directe sur tous les autres systèmes politiques est d'éduquer et responsabiliser la population par la pratique de la participation directe au pouvoir politique. Voulons-nous stagner ou progresser ?

  4. En raison du progrès technologique l'évolution vers la DD pourrait s'imposer assez rapidement comme une évidence. Mais il importe pour cela de réduire drastiquement l'analphabétisme numérique.

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Auteur : F. Jortay   |   Contact :   |   Suivre : infolettre

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